Donald Trump ne peut pas remettre en cause le droit du sol par un décret présidentiel

Donald Trump veut remettre en cause le droit du sol et interdire aux étrangers sans papiers nés aux USA d’acquérir la nationalité américaine. Il a annoncé qu’il pouvait prendre cette décision par décret présidentiel (Executive Order) et qu’il était possible de se passer d’une révision de la Constitution.

Cette annonce a été faite en pleine campagne pour le renouvellement partiel du Congrès qui présentait des enjeux politiques importants pour le maintien de la majorité républicaine. Cette question, qui vise les étrangers, était évidemment un puissant levier de mobilisation des partisans du Président américain et du camp conservateur.

Le droit du sol est prévu par la Constitution américaine (1). Cependant, la décision envisagée par Donald Trump semble juridiquement impossible à prendre (2).

1) Le droit du sol est prévu par le 14ème amendement de la Constitution américaine depuis 1868.
Il permet à toute personne née sur le sol américain d’avoir la nationalité américaine. Il a aussi été posé par le Civil Rights Act de 1866.
Cet amendement a été adopté pour contrer la décision Dredd Scott c. Sanford de la Cour suprême de 1857 qui décidait qu’aucune personne noire, libre ou esclave, ne pouvait être citoyenne américaine ou membre de la communauté politique (« political community »), ce qui revenait notamment à leur dénier le droit de vote.

Par la suite, la Cour suprême a eu plusieurs fois l’occasion de confirmer le principe et la portée de cette disposition du 14èmeamendement :
1898, Wong Kim Ark : un enfant né à San Francisco de parents chinois est un citoyen américain, quand bien même ses parents ne pouvaient pas l’être.
1982, Plyler c. Doe : les enfants sans papiers ont le droit de suivre les enseignements dans les écoles.

Profondément lié au rejet de l’esclavage et de la ségrégation, touchant à l’equal protection clause, ce principe fait partie de l’histoire et de la culture américaines. Le droit du sol traduit aux USA la force de l’assimilation des immigrants et de leurs enfants et le rejet de tout le passé raciste de cet Etat.

2) Le 14ème amendement ne peut être contredit par un décret présidentiel.
Deux raisons font penser que l’annonce de Trump n’est pas juridiquement valide.
D’une part, la Section 5 du 14ème amendement prévoit que seul le Congrès peut le modifier. Cela exclut donc le recours à un décret présidentiel.
On ajoutera que la procédure de révision de la Constitution impose qu’un amendement soit présenté par 2/3 des Chambres (Sénat et Chambre des représentants), ou par 2/3 des législatures des Etats fédérés, et ratifié par 3/4 des Etats fédérés. Le processus peut donc être politiquement complexe et long.

D’autre part, la jurisprudence de la Cour suprême américaine est claire quant au principe et à la portée du 14ème amendement et du bénéfice du droit du sol aux USA.

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